La législation du travail applicable en Polynésie Française est muette en la matière même si quelques règles éparses sont appliquées dans la pratique.En principe, la façon de se vêtir fait partie de la liberté dont dispose le salarié et relève de son seul choix (Cass. Soc., 6 novembre 2001).Toutefois, dans certains établissements, le port d’une tenue vestimentaire obligatoire est requis sur le lieu de travail.
Il convient, dès lors, de fixer les justifications de cette obligation (I) ainsi que le régime des conséquences financières qui en découle (II).
I – les justifications de l’obligation du port de la tenue de travail
En principe, cette obligation est justifiée par les contraintes d’hygiène et de sécurité (A), mais elle peut être imposée également par stratégie commerciale (B).
A – la justification sécuritaire de cette obligation
Le fondement de cette obligation trouve son origine soit dans le contrat du travail, soit dans la convention collective applicable, soit dans le règlement intérieur de l’entreprise. Ainsi, l’employeur peut bénéficier de cette prérogative dès lors qu’elle est justifiée par la nature de la tache à accomplir et proportionnée au but recherché. La Cour de Cassation a admis la licéité des prescriptions imposant le port de certains vêtements pour des raisons de sécurité. A titre d’exemple, un gardien doit porter des vêtements protecteurs (Cass. Soc., 17 avril 1986). Il en est de même pour le port de vêtements isolants lors de manipulations de produits dangereux.
En dehors de la justification sécuritaire, on peut s’interroger sur le pouvoir de l’employeur pour imposer une tenue vestimentaire à ses salariés et sur la licéité de ce pouvoir. Cette situation met en balance le pouvoir de direction de l’employeur, le droit au respect de la vie privée des salariés.
B – la justification par la stratégie commerciale et ses limites
Le choix de ses vêtements par le salarié relève du principe de la liberté d’expression que l’employeur est tenu de respecter. Cependant, la protection des droits de la personnalité n’est pas absolue dans la mesure où ils peuvent entrer en conflit avec des intérêts légitimes de l’employeur. S’impose, dès lors, une conciliation pour rechercher un équilibre entre la liberté vestimentaire du salarié et le droit pour l’employeur de donner des instructions en matière d’habillement.
Si les intérêts de l’employeur sont prépondérants, c’est le pouvoir de l’employeur, de donner des directives vestimentaires, qui prévaut. Il en va ainsi des collaborateurs qui ont un contact direct avec la clientèle, les fournisseurs ou les partenaires commerciaux. C’est parce qu’ils sont les représentants de la société et de son image que leur liberté vestimentaire va être limitée. Ainsi, une banque peut imposer le port de la cravate à ses cadres. De même, une réceptionniste peut se voir interdire le port d’un piercing facial ou des jeans déchirés.
En revanche, une employée qui travaille aux archives d’une société peut porter des jeans et des baskets. Toutefois, il existe dans ce dernier cas, une limite à ne pas franchir : la décence des tenues vestimentaires. Cette limite est justifiée par la protection de la personnalité du collaborateur en question et de celle de ses collègues. A ce titre, l’employeur doit imposer à une collaboratrice qui mettrait une tenue trop sexy d’adopter un style plus décent.
Si l’obligation vestimentaire est justifiée par l’hygiène et la sécurité du salarié ou par la protection des intérêts de l’entreprise, il a des conséquences financières non négligeables.
II – Les conséquences de l’obligation du port d’une tenue de travail
Les conséquences de cette obligation sont relatives au régime du temps d’habillage (A) et à la prise en charge des dépenses d’entretien de la tenue de travail (B).
A- le régime du temps d’habillage
Le port d’une tenue obligatoire influe sur le régime du temps imparti pour l’habillage et le déshabillage des salariés. D’une part, ces opérations doivent être réalisées sur le lieu de travail même si l’employeur autorise ses salariés à porter leurs tenues en dehors de l’entreprise (Cass. Soc., 26 janvier 2005). D’autre part, sauf dispositions conventionnelles contraires, le temps d’habillage et de déshabillage n’est pas considéré comme un temps de travail effectif mais il peut faire l’objet de contrepartie sous forme de repos ou d’indemnisations financières déterminées par convention ou par le contrat de travail.
B - la prise en charge des dépenses d’entretien
La prise en charge des frais d’entretien de la tenue vestimentaire est généralement passée sous silence par la législation du travail. Fort heureusement, la jurisprudence a comblé cette lacune même si la Cour de Cassation n’a pas encore tranché la question en litige. Par deux arrêts en date du 29 juin 2006, la Cour d’Appel de Versailles a estimé qu’un employeur imposant à son personnel le port d’une tenue de travail doit prendre en charge l’entretien de ces vêtements professionnels. Cette règle s’applique indifféremment lorsque les salariés sont contraints pour des raisons de sécurité, d’hygiène ou de stratégie commerciale.